Manifestation organisée tous les 2 ans
par l'Association des Psychologues de l'Éducation Nationale de la Vienne (ADPEN-86)
en partenariat avec l'Université de Poitiers

Brève histoire du handicap mental chez l’enfant

Bernard GIBELLO
Juin 2008
Professeur émérite de Psychopathologie
Psychanalyste


Rencontres Poitevines de Psychologie Scolaire (7ème édition) - Brève histoire du handicap mental chez l'enfant
Intervenant(s) : Bernard Gibello.
Date de publication : 26/06/2008
Durée : 00h 58min 10s

Durant longtemps, le handicap mental n’a pas été repéré en tant que maladie, ni en tant que source de mauvaise adaptation sociale, et encore moins comme susceptible d’être traité. Au mieux, les handicapés étaient-ils recueillis par des institutions religieuses charitables, au pire, ils étaient mis à mort. Les idées de la Révolution Française ont été à l’origine d’un autre regard.
Au XVIIIème siècle, des écoles destinées à des enfants sourds ou aveugles avaient été ouvertes, et quelques médecins de ces écoles avaient tenté de faire se développer l’intelligence de sujets handicapés. Itard et son travail avec Victor, le sauvage de l’Aveyron, est le plus connu, avec Seguin, Bourneville, Vallée, etc. qui, avec le recul, apparaissent avoir été quelques précurseurs mal compris de leur temps.
Au XIXème siècle une première distinction fut faite entre « idiotie et démence » par Esquirol. Diverses observations de « tableaux cliniques » précisèrent entre autres la description des « démences précoces de l’adolescent » par Morel. Au début du XXème siècle, Alfred Binet réalisa la première enquête épidémiologique et étiologique sur les enfants en retard scolaire, ce qui le conduisit à préconiser une modification de la loi de 1882 permettant l’ouverture de « classes de perfectionnement » (1907, puis 1945). Mais il fallut attendre la seconde moitié du XXème siècle pour que commencent à être distinguées clairement les arriérations mentales, les démences infantiles psychotiques, les autismes et psychoses, les dysharmonies évolutives et les dysharmonies cognitives et les inhibitions intellectuelles.
Simultanément, les lois de 1975 imposent l’intégration scolaire, et les « classes de perfectionnement » font place aux « classes d’intégration scolaire ». Puis les lois de 2005 organisent l’inscription des enfants handicapés dans l’école au même titre que les autres enfants, dans le but de les y insérer en dehors de toute discrimination.

Depuis deux siècles, l’évolution des idées et des connaissances vis à vis de la pathologie mentale des enfants a évolué spectaculairement pour ce qui concerne le regard médical et psychologique, la pratique de la pédopsychiatrie et de l’enseignement spécial. Simultanément, la psychologie du développement de l’enfant a découvert qu’avant de penser comme un adulte, l’enfant doit développer des structures de pensée lui permettant d’apprendre et de retenir ses connaissances de tous ordres, et que ces structures peuvent être l’objet de multiples désorganisations et de malformations pour des causes également multiples.

Par contre, depuis deux siècles, on constate de multiples conflits entre les principes et leurs réalisations pratiques de la prise en charge pédagogique, entre les modèles de compréhension des difficultés d’apprentissage scolaire, entre les modèles médicaux, psychologiques, éducatifs et sociaux.

Il est manifeste que la scolarisation des enfants mentalement anormaux pose des problèmes très difficiles, et à plus forte raison leur insertion scolaire et sociale. Des positions idéologiques aveuglent bon nombre d’agents de la prise en charge de ces enfants. Il s’agit d’un problème extrêmement complexe qui ne saurait être réglé par des lois ou des acteurs qui ne tiennent pas compte de cette complexité.

Enfin, et ce n’est pas le moindre problème, les relations avec des enfants à l’aspect différent, à la pensée différente, aux réactions différentes est cause de souffrance narcissique méconnue : ces enfants nous proposent une image insupportable de nous-mêmes, telle que nos interactions en sont perturbées. Quand on connaît l’importance de l’imitation dans les apprentissages et la construction de la personnalité, on comprend à quel point ces enfants sont carencés en interactions. J’illustrerai cette notion par un travail de Marie Thérèse Kardos qui en apporte l’évidence clinique

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