Chercheur en Psychologie et Sciences de l’Education
Université de Liège
Jean-Jacques DETRAUX
Professeur de Psychologie – département des Sciences Cognitives - Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education de Liège
Juin 2008
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L’organisation inclusive remet en question et même dénonce la classification scolaire sur la base de diagnostics. Elle entend se détacher de l’organisation médicalisante et psycho(patho)logisante qui peut amener à confondre déficience et besoin ; elle se désolidarise d’un mouvement qui peut amener à penser qu’une prise en charge spécialisée répond en elle-même à un besoin de l’enfant. Dans la conception inclusive, il est reconnu que « les besoins éducatifs spécifiques » sont présents chez tous les élèves, et ils ne sont pas utilisés pour caractériser une catégorie d’entre eux. L’état de l’enfant n’est donc plus vu comme le seul déterminant des inadaptations quand elles sont constatées. Désormais, l’accent est mis sur la nécessité d’accompagner tout élève dans son processus d’apprentissage au sein d’un système de relations humaines. Le travail consiste à établir une base de confiance entre élèves, enseignant(s) et parents, afin de co-construire un projet commun renforçant en retour la relation de confiance.
Il y aura lieu d’être attentif à une valorisation des ressources (conditions d’apprentissage, attitudes de l’enseignant, des pairs, évaluation du potentiel de l’élève,…). Au cours de cet exposé, nous nous attarderons donc sur des connaissances plus ciblées à propos de l’apprentissage, mais nous rappellerons aussi que pour apprendre, l’élève s’appuie sur une base cognitive, une expérience émotionnelle positive et un sentiment de sécurité physique et psychique. Ces trois dimensions peuvent être prises en compte tant dans l’enseignement spécialisé que dans l’enseignement ordinaire.
Les recherches qui ont abordé l’efficacité de l’enseignement dispensé sous l’angle d’une opposition entre systèmes éducatifs ou sur la base de types de déficiences ont souvent été critiquées pour la partialité de leurs auteurs, et pour le fait que trop de variables individuelles venaient interférer dans les résultats obtenus. De manière générale, il manque de données longitudinales. Mais ce que l’on peut affirmer au regard de la littérature, c’est d’une part que les élèves qui connaissent le plus facilement le rejet du milieu scolaire sont ceux qui ont un comportement exubérant voire agressif, et que d’autre part il semble difficile de déceler un bénéfice de l’intégration pour les élèves dont le handicap est très profond et pour lesquels les familles ne sont d’ailleurs souvent pas en demande d’intégration.
Si l’on ne peut donc prouver la supériorité d’une organisation éducative sur l’autre, la vie communautaire d’enfants tous différents revêt de multiples enjeux et son impact n’est pas négligeable sur la qualité de vie des familles. Il reste que parce qu’elle fait intervenir des systèmes humains, la concrétisation de l’organisation inclusive est progressive et complexe.
Aujourd’hui, quantité d’initiatives plus ou moins heureuses, plus ou moins soutenues, plus ou moins permanentes existent, mais la qualité des interventions et leur efficience d’une part et le vécu des partenaires impliqués d’autre part ne sont que rarement l’objet d’une évaluation. Pourtant, nés de la pratique, on peut trouver des repères pour l’organisation de l’intégration, et des outils sont disponibles. Nous y reviendrons au cours de l’exposé.
« Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles qu’on n’ose pas les faire ; c’est parce qu’on n’ose pas les faire qu’elles sont difficiles ».
Sénèque
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